Quand l'IGAS se rend compte que les fusions entre hôpitaux sont nocives

Mis à jour le 12 janvier 2024 à 09:45
Quand l'IGAS se rend compte que les fusions entre hôpitaux sont nocives

Si cette étude qui paraît ce lundi avait été publiée plus tôt, elle aurait permis d’éviter bien des gâchis humains et financiers. L’Inspection générale des affaires sociales (IGAS) a émis aujourd’hui un bilan très mitigé des fusions entre hôpitaux qui souhaiterait finalement voir rester “rares” dans l’avenir.

L’Igas a établi un bilan des fusions hospitalières impliquant des établissements publics de santé (EPS) ayant une activité de court séjour -médecine, chirurgie et/ou obstétrique-, et formule une série de 29 recommandations adressées au gouvernement. Son rapport final n’y va pas avec le dos de la cuillère: “A l’hôpital, comme dans le secteur des entreprises, beaucoup de fusions échouent à atteindre leurs objectifs, et certaines contribuent même à aggraver les difficultés des entités qu’elles ont réunies.”

Intérêt pas démontré

Plusieurs facteurs compromettent “dès l’origine un rapprochement entre deux structures”: un temps de trajet trop important entre elles, des bassins de vie trop différents ou encore l’absence de complémentarité des activités, note le rapport. Dès lors, “en raison des difficultés qu’elle soulève et des risques qu’elle présente, la fusion doit demeurer une opération rare, à réserver aux cas où elle paraît effectivement indispensable”. Car, si les fusions “participent du vaste mouvement de restructuration hospitalière”, leur intérêt “est loin d’être uniformément démontré”.

Fusion inefficace financièrement

Sur le plan financier, la fusion n’est “en général pas l’outil le plus pertinent pour réduire les déficits hospitaliers”, qui supposent surtout “un effort de réorganisation interne”, explique l’Igas. “En théorie en effet, un établissement de plus grande taille rend des soins de meilleure qualité et réalise des économies d’échelle”, mais “cet effet positif est particulièrement établi pour les plus petits établissements” (moins de 300 lits).

Au-delà d’un certain seuil, entre 600 et 900 lits de court séjour, “la grande taille présente pour un hôpital plus d’inconvénients que d’avantages” et “l’expérience enseigne que les processus de fusion sont en eux-mêmes sources de surcoûts ou de dysfonctionnements”.

Au vu de cette étude, le gâchis est d’autant plus important que 90 fusions d’établissments public de santé ont été menés entre 1995 et 2011.

Préconisations de l’IGAS

Le rapport de l’IGAS, qui arrive donc un peu après la bataille, propose des pistes pour sortir du dogme de la fusion:

  • reconnaissance du rôle “important” des ARS (agences régionales de santé). Le ministère de la Santé doit “clarifier son discours en direction des ARS et des acteurs de l’hospitalisation sur la nécessité et les finalités des restructurations hospitalières”, note le rapport
  • en obstétrique, “accorder des dérogations de longue durée aux maternités dont la disparition dégraderait notablement l’accès aux soins”
  • en chirurgie, “fixer un seuil d’activité pour les blocs opératoires et les plateaux techniques” et “de fermer ceux qui ne fonctionnent pas suffisamment”
  • continuer de promouvoir la pratique ambulatoire (sans hébergement à l’hôpital), mais “en veillant à éviter un développement trop anarchique, en particulier dans les petites structures”

Meilleur dialogue social

Le rapport propose enfin un meilleur accompagnement des personnels concernés par une fusion, par exemple en créant une instance de dialogue social “spécifique au projet”. Au bout de quinze années de casse sociale dans les hôpitaux, cette préconisation fera au mieux rire jaune les salariés de la Santé.

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